Plaidoyer pour la dépression

La dépression est généralement perçue comme une maladie, au mieux comme un passage difficile dont il faut sortir au plus vite. Elle se définit comme une combinaison de symptômes tels que :

  • Une tristesse continue
  • Des larmes qui viennent sans raison immédiate
  • Une perte d’intérêt et de plaisir
  • Des idées de mort ou de suicide
  • Une fatigue continue qui peut aller jusqu’à une sensation d’épuisement
  • Des troubles du sommeil (insomnies)
  • Des difficultés d’attention, de concentration et de mémoire

La dépression peut être accompagnée de bouffées d’angoisse, mais l’angoisse et la dépression sont deux faits distincts.

Elle est massivement perçue comme une incapacité de la personne à faire face à une situation. Etre dépressif est donc très dévalorisant, au point que le DSM V (Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux) considère ce symptôme de mésestime de soi comme étant significatif dans le diagnostic de la dépression. Je pense que ce symptôme est induit par le regard que porte la société sur la dépression. Et c’est là tout le drame, car la dépression c’est bien autre chose qu’une calamité.

La dépression est la manifestation d’une profonde transformation de l’être. Ce n’est pas le signe d’une inadaptation à une situation, c’est au contraire l’expression même du processus de transformation afin non pas de s’adapter à une situation, mais d’intégrer cette situation pour arriver à un état d’être différent.

Ce processus à la fois physique et psychique (mais en tant que thérapeute psycho-corporel je ne peux voir de distinction) est très intense et demande énormément d’énergie, d’où le sentiment d’intense fatigue qui l’accompagne. Il est très déstabilisant car nos repères et nos points de vue sont modifiés, jusqu’à notre conscience de nous-mêmes. Mais il est extraordinairement efficace pour peu qu’on accepte de le laisser se dérouler complètement et qu’il soit bien accompagné.

La principale difficulté pour la personne en dépression est qu’elle n’est ni comprise ni acceptée, et qu’elle est amenée à croire qu’elle doit se sortir à tout prix de cet état. La conséquence est fâcheuse : la lutte entre le processus de transformation et la volonté de l’arrêter engendre énormément de souffrance et un sentiment de grande détresse. De plus, le processus se trouve bloqué et crée des tensions qui vont s’enfouir en nous pour en libérer la conscience. C’est donc un échec.

L’accompagnement de la personne en dépression est donc primordial. En premier lieu, il convient de la rassurer sur cet état. Ce n’est pas une faute que de faire une dépression. Le processus peut prendre un certain temps, et ce temps est incompressible. Dormir, se reposer autant que nécessaire. Ne pas se faire violence. Pour l’entourage, ne pas manifester de signe d’impatience ni de jugement. Et si le besoin s’en fait sentir, se faire accompagner par son thérapeute et se faire masser. Le massage thérapeutique est d’une aide immense à l’intégration et à la traversée de l’état dépressif.

En résumé, la dépression n’est pas une maladie. C’est un processus de guérison, une traversée – difficile et douloureuse certes – vers un nouvel état. La maladie survient lorsque ce processus est incompris, refusé ou entravé. Le refus de la dépression maintient l’individu dans sa névrose et empêche son évolution, son individuation. Au contraire, l’accueil de ce bouleversement, par la personne et par son entourage, et son accompagnement bienveillant rendent ce passage bien plus fluide et profitable.

On dit souvent que la dépression est un signal que notre corps nous envoie pour nous dire que ce que ne vivons n’est pas en accord avec ce que nous sommes. A mon sens c’est bien plus qu’un signal, le corps a déjà commencé le travail. Il n’est même pas forcément nécessaire de se creuser la tête pour comprendre ce qui ne va pas, à l’issue du processus la question même aura disparu, car c’est la conscience qui aura évolué. Il faut apprendre à faire confiance à son corps.

Ami lecteur, tu penseras peut-être qu’il n’y a pas grand-chose de nouveau dans cet article, et tu as sans doute raison. Mais je vois encore tellement de personnes qui culpabilisent de traverser une dépression, ou qui sont durement jugés par leur entourage (« Mais enfin, secoue toi un peu, ne reste pas à te vautrer dans cet état ! ») que j’avais très envie de repréciser certaines idées.

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